Interactions culturelles et répression du mouvement hippie au Mexique
Cultural Interactions and Repression of the Hippie Movement in Mexico
Nicolas Balutet1
Résumé: Si le mouvement hippie naît aux États-Unis dans les années 1960, il n’est pas resté circonscrit à ce seul territoire mais s’est largement diffusé dans bien d’autres parties du monde dont le Mexique. Est-ce à dire que, dans le cas précis de ce pays, l’influence du mouvement n’a été qu’unilatérale, dans le sens nord-sud? S’appuyant sur des récits de chroniqueurs du xvie siècle et des témoignages culturels des années 60 et 70, le présent article montre que le Mexique a contribué à définir plusieurs aspects essentiels de la culture hippie comme l’utilisation de drogues et l’exaltation de l’indianité. Cela étant, il semble, en même temps, que c’est grâce aux voisins du nord que les Mexicains ont redécouvert certains aspects de leur culture. Le mouvement hippie mexicain a néanmoins quelques spécificités: la présence de jeunes Indiens et une nouvelle conception de la nation, deux éléments perturbateurs pour la société conservatrice mexicaine, qui, associés à l’usage de drogues et à la libération sexuelle, expliquent la répression anti-hippie pendant une dizaine d’années.
Mots-clés: Hippies; Mexique; drogues; indianité; influence; répression.
Abstract: Although the hippie movement was born in the United States in the 1960s, it did not remain confined to this one territory but spread widely in many other parts of the world including Mexico. Does this mean that, in the specific case of this country, the influence of the movement was only unilateral, in the north-south direction? Using accounts of colonizers of the 16th century and cultural testimonies of the 60s and 70s), this article shows that Mexico has made a contribution to defining several essential aspects of hippie culture such as the use of drugs and the exaltation of Indianness. That said, it seems, at the same time, that it is thanks to the northern neighbors that the Mexicans have rediscovered certain aspects of their culture. The Mexican hippie movement nevertheless has some specificities: the presence of young Indians and a new conception of the nation, two disruptive elements for the Mexican conservative society, which, associated with the use of drugs and sexual liberation, explain the anti-hippie repression for about ten years.
Key words: Hippies; Mexico; drugs; Indianness; influence; repression.
Reçu : 24 avril 2020
Accepté : 28 août 2020
DOI: 10.22201/cialc.24486914e.2022.74.57358
Le mouvement hippie apparaît à bien des égards comme l’un des courants de contre-culture les plus importants du XXe siècle.2 Il se caractérise, à grands traits, par la remise en cause des valeurs traditionnelles, le refus des guerres, du capitalisme consumériste et de la rigidité de certains rôles sexuels et genrés, et prône, au contraire, une forme de néo-rousseauisme ou retour à la nature, l’examen des cultures et des spiritualités étrangères, l’hédonisme et l’expérimentation sexuelle, la mise en place de nouveaux liens familiaux et amicaux. San Francisco et, plus précisément, le quartier de Haight-Ashbury, sont considérés, à juste titre, comme le cœur du mouvement hippie (Chastagner 2011: 97; Leriche et Rubin 2011: 119-129). Michel Lancelot souligne que les collines de cette ville californienne ne sont pas loin de symboliser «son refus de la platitude, et du nivellement, sa libéralité, souvent son anticonformisme» (1972: 63-64). C’est là que se sont installées les premières communautés s’opposant à la société mainstream (Dister 2006: 114; Hoskyns 2006: 9), c’est là que le terme hippie, dérivé probablement de hip, «dans le coup», est apparu au milieu des années 1960 dans un journal (Labin 1970: 25; Lombard 1972: 9; Creagh 1983: 167; Robert 2011: 57). Néanmoins, si San Francisco est un lieu iconique de la contre-culture, le mouvement n’est pas resté circonscrit à ce seul territoire mais s’est largement diffusé tant aux États-Unis que dans bien d’autres parties du monde dont le Mexique. Est-ce à dire que, dans le cas précis de ce pays, l’influence du mouvement n’a été qu’unilatérale, dans le sens nord-sud? Il semble, au contraire, que le Mexique a contribué puissamment à définir plusieurs aspects essentiels de la culture hippie comme l’utilisation de drogues et l’exaltation de l’indianité.
La consommation de substances hallucinogènes est, en effet, l’une des caractéristiques principales du mouvement hippie, l’idée étant d’accéder à des états de conscience inhabituels, des sensations nouvelles et intenses, d’autres réalités difficiles à décrire pour le profane (Plossu 1970: 47; Allain 1973: 14-17; Lanternari 1983: 78; Evans Schultes, Hofmannet Rälsch 2000: 12; Chambon 2007: 17). On emploie fréquemment à leur propos le terme «psychédélique», du grec psyche, «l’esprit», et delos, «ce qui est révélé» (Chastagner 2001: 101), un néologisme inventé en 1961 par le psychologue Timothy Leary qui traduit cette exaltation ou expansion de l’esprit provoquée par l’absorption de certains produits (Lombard 1972: 133; Robert 2011: 85). Outre le cannabis qui «se démocratise» dans les années 1960 (Saint-Jean Paulin 1997: 119), des produits chimiques comme le LSD 3 ou d’autres d’origine végétale font leur apparition. Or, ces plantes, particulièrement appréciées par les hippies en raison de leur caractère naturel et sacré au sein des cultures indiennes (Saint-Jean Paulin 1997: 125), proviennent essentiellement du Mexique. Il s’agit du peyotl, de champignons et de l’ololiuhqui.
Le peyotl, mot d’origine nahuatl signifiant vraisemblablement «stimuler», «mettre en mouvement», «exciter» (Rouhier 1989: 7), est un petit cactus sans épines qui pousse dans des zones semi-désertiques du nord du Mexique et du sud du Texas (Benzi 1972: 295; Stewart 2001: 19; Agustín 2012: 47). Il possède des graines rouges en forme de haricots qui, une fois desséchées et broyées, donnent une drogue aux propriétés psychédéliques (Labin 1970: 90-91; Saint-Jean Paulin: 1997: 126). La plante renferme, en effet, neuf alcaloïdes, dont la mescaline qui produit des hallucinations colorées (La Barre 1964: 127).
Son utilisation ne date pas de la période hippie, puisque les chamans, les chefs et les guerriers indiens l’utilisaient déjà à des fins curatives et divinatoires depuis plusieurs siècles (Pivano 1977: 27-28). De nombreux témoignages vont dans ce sens. Ainsi, au XVIe siècle, Francisco Hernández (1571-1576), Bernardino de Sahagún (1577) et Juan de Cárdenas (1591) notent déjà que:
On attribue des propriétés merveilleuses à cette racine, s’il faut prêter foi à ce qu’on en dit communément. Elle permet à ceux qui en prennent de prévoir et de prédire des choses.4
Il y a une autre plante, semblable aux truffes, elle s’appelle «peyotl»; elle est blanche et pousse dans les parties les plus septentrionales ; ceux qui la mangent ou la boivent ont des visions effrayantes ou amusantes; cette ivresse dure deux ou trois jours puis elle cesse; c’est une consommation habituelle chez les Chichimèques, car cela les soutient et leur donne du courage pour le combat en les mettant à l’abri de la peur, de la soif et de la faim; ils croient même que cela les protège de tout danger.5
Parlant avec vérité du peyote, du poyomate et de l’hololisque qui, s’ils sont pris par la bouche, privent tant de jugement le misérable qui en fait usage que, entres autres terribles et épouvantables fantômes, ils leur montrent le démon, et même, selon certains, ils leur font connaître les choses à venir, ce qui est la marque de la ruse de Satan, dont le rôle est de tromper avec la permission divine le misérable qui le recherche en de semblables occasions.6
Aux XVIIe et XVIIIe siècles, apparaissent d’autres récits identiques, signés de religieux, souvent des Jésuites, comme Domingo Lázaro Arregui (1621), Andrés Pérez de Ribas (1645), Andrés Estrada Flores (1659), Francisco Javier Alegre (1763) ou bien José Arlegui (1737), lequel remarque dans la province mexicaine de Zacatecas (centre-nord du Mexique) que :
La racine qu’ils vénèrent le plus s’appelle peyotl, qu’ils moulent et boivent pour toutes leurs maladies; et ce ne serait pas si grave s’ils n’abusaient de ses vertus: car pour découvrir les choses futures et connaître le résultat de leurs batailles, ils la boivent broyée dans l’eau et, comme elle est très forte, elle les enivre avec des accès de folie, et toutes les imaginations fantastiques que leur procure cette horrible boisson sont considérées comme des présages du destin, s’imaginant que la racine leur a révélé leurs succès futurs.7
Plus proches de nous, les ethnologues du XXe siècle ont observé que le peuple huichol (centre-ouest du Mexique), dont les rites perpétuent un héritage précolombien (Furst 1974a: 123), vénère le híkuri, nom donné au peyotl,8 au point d’organiser des «chasses» rituelles de la plante qui prennent la forme de longs pèlerinages de plus de 400 kilomètres afin d’atteindre Wirikuta, un endroit mythique situé dans les déserts de San Luis Potosí. Là, en lien avec une légende concernant le dieu du vent Tama’ts Pariké, ont lieu des cérémonies en hommage au cerf sacré durant lesquelles l’absorption de peyotl joue un rôle essentiel (Allain 1973: 40-41; Marroquín 1975: 35; Rouhier 1989: 92; Evans Schultes 1995: 9-18; Evans Schultes, Hofmannet Rälsch 2000: 148-150; Agustín 2012: 48).
S’il est redécouvert massivement par les hippies à partir des années 1960, le peyotl n’est donc pas une plante aux effets méconnus jusqu’alors. D’ailleurs, quelques années voire quelques décennies plus tôt, plusieurs écrivains occidentaux – les Français Antonin Artaud (1974) et Charles Duits (1994) ou le Britannique Aldous Huxley (1977), par exemple – en avaient fait l’expérience, décrivant combien leur imagination, leurs sens et leurs sensations avaient été stimulés par l’ingestion de la plante grâce à laquelle ils accomplissaient un voyage intérieur.9 Aux États-Unis, l’Église des Amérindiens, la Native American Church, fondée en 1918, utilisaient déjà le peyotl pour ses sacrements, ce qu’elle continue de faire.10
Le Mexique regorge également de champignons contenant de la psilocybine –environ la moitié des espèces mondiales (Guzmán 1995: 84)–, une substance aux effets hallucinogènes proches de ceux du LSD (Les hippies 1968: 226; Labin 1970: 92; Chambon 2007: 175). Les propriétés de ces champignons sont connues depuis des siècles par les Indiens et nombreux sont les chroniqueurs des XVIe et XVIIe siècles qui ont décrit le contexte de leur utilisation, souvent religieux, et les conséquences de leur ingestion, rappelant l’ébriété. C’est le cas, par exemple, de Francisco Hernández (1571-1576), Toribio de Benavente «Motolinía» (milieu du XVe siècle), André Thévet (seconde moitié du XVIe siècle), Bernardino de Sahagún (1577), Diego Durán (1587) et Jacinto de la Serna (1661):11
D’autres [champignons], quand on les mange, n’entraînent pas la mort mais une folie parfois durable, dont le symptôme est une sorte d’hilarité irrésistible. On les appelle communément teyhuinti. Ils sont de couleur fauve, d’un goût amer et possèdent une certaine fraîcheur qui n’est pas désagréable. D’autres encore, sans provoquer le rire, font défiler devant les yeux des visions de touts sortes, comme des combats ou des images de démons. D’autres, parce qu’ils sont redoutables et effrayants, étaient les plus recherchés par les nobles pour leurs fêtes et leurs banquets; ils atteignaient des prix extrêmement élevés et étaient ramassés avec beaucoup de soin. Cette espèce est de couleur foncée et d’une certaine âcreté.12
Ils avaient une autre façon d’atteindre l’ébriété qui aiguisait leur cruauté. Ils utilisaient certains champignons ou petits mousserons car il y en a dans ce pays comme en Castille; mais ceux d’ici sont d’une espèce telle que, les mangeant crus et en raison de leur amertume, ils boivent après eux et mangent avec eux du miel d’abeille; et bientôt après ils avaient mille visions et particulièrement des serpents. Comme ils perdaient complètement la raison, il leur semblait que leurs jambes et leur corps étaient pleins de vers qui les dévoraient vivants, et ainsi, à demi enragés, ils sortaient de leurs maisons, désirant que quelqu’un les tue; et suite à cette ivresse bestiale et à la fatigue qu’ils en éprouvaient, il arrivait à l’occasion que l’un d’eux se pende et, en outre, ils étaient plus cruels que d’habitude les uns envers les autres. Ils appelaient ces champignons dans leur langue teonanacatl, ce qui signifie chair de Dieu ou du Diable qu’ils adoraient et de cette façon, avec cette amère nourriture, ils recevaient leur Dieu cruel en communion.13
[parlant du peuple otomí] Il pourtoyt grand révérence aux dieux et avoyt grand soing des temples et cérémonies; il ordona aussi que les jeunes hommes et filles dancessent aux temples despuys le soyr jusques à minuict pour donner plaisir aux dieux. […] [I]l leur fit faire des vestements les plus beaux qu’il peut […] et dançant tousiours davant eux tant ceux de la ville que les prochains voisins, les quels le diable abeusoyt leur faisant manger quelque herbe quils noment nauacatl la quelle les faisoyt hors de sens et voyr beaucoup de visions.14
[parlant des marchands de retour d’un long voyage] La première chose que l’on mangeait pendant la fête, c’était de petits champignons noirs qu’on appelait nanacatl, qui enivrent et causent des hallucinations et même provoquent la luxure. Ils en mangeaient avant qu’il fît jour et ils prenaient également du cacao avant l’aurore. Ils mangeaient ces petits champignons avec du miel et, quand ils se sentaient échauffés sous leur influence, ils commençaient à danser. Quelques-uns chantaient, d’autres pleuraient parce qu’ils étaient ivres avec les petits champignons. Certains ne voulaient pas chanter mais s’asseyaient dans leurs chambres et restaient là, pensifs. Quelques-uns voyaient dans une vision qu’ils mouraient et se mettaient à pleurer. D’autres voyaient dans une vision qu’ils étaient dévorés par quelque bête sauvage. D’autres voyaient dans une vision qu’ils faisaient des prisonniers à la guerre. D’autres voyaient dans une vision qu’ils devaient devenir riches. D’autres voyaient dans une vision qu’ils devaient posséder beaucoup d’esclaves. D’autres voyaient dans une vision qu’ils devaient commettre l’adultère et qu’on leur écraserait la tête pour ce méfait. D’autres qu’ils tueraient quelqu’un et que, en conséquence, ils seraient tués. D’autres voyaient dans une vision qu’ils se noieraient. D’autres voyaient dans une vision qu’ils tomberaient d’une hauteur et mourraient de la chute. Ils voyaient tous ces événements désastreux dans une vision. D’autres voyaient dans une vision qu’ils s’enfonçaient dans de l’eau, dans un tourbillon. Quand l’ivresse des champignons s’était dissipée, ils parlaient entre eux des visions qu’ils avaient eues.15
[parlant des Chichimèques, des Indiens nomades du nord du Mexique] Ils faisaient de même avec ceux qu’ils appellent nanacatl, qui sont les champignons mauvais qui enivrent comme du vin. Et ils se rassemblaient dans une plaine après en avoir mangé, où ils dansaient et chantaient jour et nuit tout à leur aise, le premier jour surtout car, ensuite, le lendemain, tous pleuraient abondamment, en disant qu’ils se nettoyaient et lavaient leurs yeux et leurs visages avec leurs larmes.16
Il y a dans cette région des petits champignons qui s’appellent teonanácatl. Ils poussent sous l’herbe dans les champs ou dans des déserts. Ils sont ronds et ont un petit pied long, mince et rond. Quand on les mange, ils ont mauvais goût, font mal à la gorge et enivrent. Ils sont utilisés comme des médicaments contre les fièvres et la goutte. Il ne faut pas en manger plus de deux ou trois. Ceux qui les mangent ont des visions et ressentent des palpitations au cœur. Ceux qui en mangent beaucoup, voire peu, sont portés à la luxure.17
Le sacrifice terminé, et les marches du temple et la cour restant baignées de sang humain, ils s’en allèrent tous manger des champignons crus, une nourriture qui leur faisait perdre à tous la raison et les laissait dans un état pire que s’ils avaient bu beaucoup de vin; ils étaient tellement ivres et privés de raison que beaucoup se suicidaient, et grâce au pouvoir de ces champignons, ils avaient des visions et l’avenir leur était révélé, le Diable leur parlant durant leur état d’ivresse.18
[…] était arrivé un Indien, originaire du village de Tenango, grand maître des superstitions. Il s’appelait Juan Chichiton, ce qui signifie «petit chien», et il avait apporté les champignons de couleur rouge que l’on cueille dans les bois. Avec eux, il avait pratiqué une grande idolâtrie et, avant de la raconter, je souhaite décrire la propriété desdits champignons qui sont appelés en langue mexicaine Quautlan nanacatl. Ayant consulté le licencié don Pedro Ponce de León, […], il me dit que ces champignons étaient petits et rouges et que, pour les ramasser, les prêtres et les vieux spécialistes envoyés pour ces impostures allaient dans la forêt où ils restaient en prière et en propos superstitieux pendant presque toute la nuit. À l’aube, quand se levait une certaine brise qu’ils connaissent bien, ils cueillaient alors les champignons, leur attribuant la divinité, ayant en fait les mêmes propriétés que l’ololiuhqui ou le peyotl, parce que, si on les mange ou on les boit, ils enivrent et privent de raison et leur font croire à mille choses insensées. Ainsi, à tous les présents à la fête, ce Juan Chichiton […] donna à manger ces champignons sous forme de communion et à boire du pulque […], de sorte qu’avec les champignons d’une part et le pulque d’autre part, ils perdirent tous la tête ce qui fut lamentable.19
L’idée que la consommation du teonanácatl ait, pour les catholiques, un lien avec l’œuvre du démon apparaît clairement dans deux dessins. Le premier, qui présente un énorme champignon sur lequel se dresse un monstre, accompagne l’œuvre de Bernardino de Sahagún; le second, où un consommateur tourne le dos au dieu aztèque de la mort Mictlantecuhtli, se trouve dans le Codex Magliabecchiano, un document iconographique du milieu du XVIe siècle (Heim et Wasson 1958: 35).
À la fin des années 1950, c’est Robert Gordon Wasson qui a popularisé les propriétés de certains champignons mexicains. Le 13 mai 1957, il publie dans le magazine états-unien Life un long article dans lequel il explique l’origine de sa passion fongique et ses expérimentations et visions auprès de la chamane María Sabina.20 Appelés «saints enfants» ou «petits anges» par les Mazatèques (Heim et Wasson 1958: 53; Rodríguez 2016: 75; Rodríguez Venegas 2017: 27), les champignons ingérés par Wasson, perçus comme l’émanation du sang que le Christ déversa sur la terre (Rodríguez 2016: 75), permettraient un voyage dans l’au-delà selon María Sabina:
Il y a un monde au-delà du nôtre, un monde invisible, lointain mais aussi proche. Là, Dieu vit, les morts, les esprits et les saints vivent; c’est un monde où tout s’est déjà produit et où tout est connu. Ce monde parle, il a son propre langage. Je répète ce qu’il me dit. Les champignons sacrés me prennent et m’amènent au monde où tout est connu. Ce sont eux, les champignons sacrés, qui parlent d’une manière que je peux comprendre. Je leur pose des questions et ils me répondent. Quand je reviens du voyage, je dis ce qu’ils m’ont dit, ce qu’ils m’ont montré.21
C’est aussi au Mexique, à Cuernavaca, à 80 km au sud de la capitale mexicaine, que Timothy Leary ingère pour la première fois les champignons hallucinogènes. L’action, qui se déroule au cours de l’été 1960, est racontée ainsi par le psychologue:
Jadis, il y a fort longtemps, par un après-midi ensoleillé dans le jardin d’une villa de Cuernavaca, j’avalai sept champignons sacrés qui m’avaient été donnés par un savant de l’université de Mexico. Pendant les cinq heures suivantes, je me trouvai entraîné dans le déferlement d’une expérience que je pourrais tenter de décrire grâce à de nombreuses et extravagantes métaphores, mais qui fut avant tout et sans aucun doute la plus profonde expérience religieuse de ma vie (1979: 1).
Je m’ouvris à la félicité, comme les mystiques qui, dans les siècles passés, avaient jeté un coup d’œil furtif de l’autre côté du rideau pour découvrir que ce monde – si manifestement réel – n’était en fait qu’une minuscule scène de théâtre échafaudée par l’esprit. Il y avait un océan de possibles là dehors (là-dedans), d’autres réalités, un éventail illimité de programmes pour des avenirs différents (1984: 39).
Moins connue que le peyotl ou les champignons, une autre plante mexicaine,22 la Turbina corymbosa ou ololiuhqui, donne des graines aux propriétés hallucinogènes. Utilisée depuis la période précolombienne,23 elle est décrite pour la première fois en 1629 par Hernando Ruiz de Alarcón qui décide de combattre son utilisation chez les Indiens:
[l]’ololiuhqui est une sorte de graine comme des lentilles produites par une sorte de lierre d’ici, et si on boit cette graine, on perd la raison parce qu’elle est très puissante; c’est ainsi qu’ils communiquent avec le diable, puisque celui-ci leur parle généralement lorsqu’ils ont perdu la raison à cause de cette boisson et il les abuse sous différentes apparences et ils attribuent tout cela à la divinité qui se trouve, selon eux, dans ladite graine, appelée ololiuhqui o cuexpalli ce qui est la même chose.24
L’ololiuhqui intéresse les hippies car elle contient des acides proches du LSD qui provoquent un état hypnagogique, c’est-à-dire un état de conscience entre la veille et le sommeil au cours duquel ont lieu des hallucinations visuelles ou auditives (La Barre 1964: 130-131; Agustín 2012: 56).
Outre la présence de plusieurs plantes aux propriétés hallucinogènes sur son territoire, le Mexique a, de même joué un rôle central pour les hippies qui se sont intéressées aux cultures indiennes présentes également, bien entendu, aux États-Unis. Rejetant les valeurs de la société urbaine et s’inspirant de Rousseau ou d’Henry David Thoreau (Les hippies 1968: 25; Morin 1983: 133), les hippies entendent retrouver une forme de communion avec la nature que les peuples indiens n’auraient pas perdu à leurs yeux (Robert 2011: 225).25 Ils adoptent leurs tenues, portent les cheveux longs comme eux et, dans leur quête de spiritualité, vont s’intéresser au chamanisme.26 L’utilisation des drogues est, d’ailleurs, intimement liée à la religion. Comme le souligne le découvreur du LSD Albert Hoffman et comme nous l’avons déjà signalé, la psilocybine ou la mescaline «font partie des substances sacrées […] utilisées pendant des milliers d’années dans des cadres rituels» (Chambon 2007: 37-38). Dès lors, elles vont servir de fondement à une nouvelle «religion». Le philosophe Alan Watts pense ainsi que les hallucinations liées à la consommation de ces produits, notamment le LSD, mènent à l’extase mystique et donc à la communion avec l’au-delà et à la spiritualité (Watts 1971: 25; Saint-Jean Paulin 1997: 138; Robert 2011: 101-102), une opinion que partage Timothy Leary. Pour ce prosélyte, «[l]es drogues sont la religion du XXIe siècle», ajoutant que «[d]e nos jours, mener une vie religieuse sans utiliser de drogues psychédéliques, c’est comme si on faisait de l’astronomie à l’œil nu sous prétexte qu’il en était ainsi au Ier siècle après Jésus-Christ, et que les télescopes ne sont pas naturels» (1984: 41).
Si le Mexique et ses «richesses» ont inspiré les hippies anglo-saxons, ne peut-on pas considérer tout de même une certaine forme d’unilatéralité dans la diffusion du mouvement. En effet, les Mexicains n’ont-ils pas redécouvert certains aspects de leur culture grâce à leurs voisins du nord? Il semble, en effet, que ce soit le cas. Néanmoins, contrairement aux hippies états-uniens qui n’ont fait qu’idéaliser et essentialiser les minorités ethniques (les Indiens comme les Afro-descendants) sans les inclure véritablement au sein de leur mouvement, les hippies mexicains issus des classes moyenne et bourgeoise (Zolov 1995: 349)27 sont parvenus à rallier à leur cause de jeunes Indiens et, plus important encore, dans un pays qui s’est construit sur le mythe du métissage absolu et sur l’oubli de l’héritage des peuples méso-américains (si ce n’est dans le folklore), à porter une nouvelle conception de la nation visant à revaloriser l’Indien mexicain et à se réapproprier sa culture (Marroquín 1975: 12-29; Guillén Escamilla 2004: 59-61; Agustín 2012: 76-77). Si les détracteurs des hippies au Mexique ont vu dans le mouvement un nouveau colonialisme états-unien,28 il a pourtant pris des formes autochtones,29 dont la première et non la moindre, sans toutefois la surévaluer, a été une plus forte conscientisation politique.30 Il s’agit-là d’un élément qui perturbe la société conservatrice mexicaine. Il en va de même avec l’utilisation des drogues et la libération de la sexualité, laquelle est également une des grandes caractéristiques du mouvement hippie.
Cette sexualité plus libre est favorisée par la vie en communauté, la légalisation de la pilule contraceptive et l’utilisation de diverses drogues qui lèvent les inhibitions et poussent au rapprochement et à la communion avec autrui (Leary 1984: 148-149; Saint-Jean Paulin 1997: 99-101, 142; Lacroix 2006: 29; Robert 2011: 151-152, 155, 164). Influencés par la lecture du psychanalyste Wilhelm Reich pour qui l’orgasme et une vie sexuelle active engendrent une bonne santé physique et mentale (Reich 1970; Monneyron 2011: 203-204), de même que par celle du philosophe Herbert Marcuse (1963: 15 et suivantes) qui imagine une société conciliant plaisir et travail, les hippies s’adonnent désormais à de multiples expérimentations sexuelles, dont Frédéric Robert (2001: 164) nous livre un aperçu dans La révolution hippie.31 Mais cette sexualité explicite est aussi politique. Elle lutte contre les tabous et les normes morales des sociétés puritaines fondées sur le modèle de la famille bourgeoise (virginité avant le mariage, fidélité ensuite, nécessité d’avoir des enfants, etc.) (Robert 2011: 151). En revanche, contrairement aux idées reçues, le mouvement hippie ne remet guère en cause la place des femmes dans la société. De manière toujours fort patriarcale, la femme continue d’être perçue comme un objet sexuel et reste cantonnée aux fonctions domestiques, notamment au sein des communautés (Saint-Jean Paulin 1997: 104-106; Chastagner 2011: 109).32
Usage de drogues, libération sexuelle et conscientisation politique expliquent la répression dont ont fait l’objet au Mexique les hippies, étrangers comme mexicains, pendant une dizaine d’années. Dès 1963, Timothy Leary et son assistant Richard Alpert sont ainsi expulsés de leur hôtel de Zihuatanejo (Guerrero). Après avoir fondé au début de l’année l’International Foundation for Internal Freedom (Fondation internationale pour la liberté intérieure), ils avaient convié la presse et la télévision mexicaines à faire un reportage sur leur «colonie de vacances psychédélique», selon les propres mots de Leary (1984: 175). La suite est racontée par Barry Miles, un spécialiste britannique de la contre-culture:
Les journalistes sont accueillis par une femme d’un certain âge, nue et hystérique, arborant un Christ en croix grossièrement peint sur le corps. En plein bad trip, elle surgit dans l’encadrement d’une porte. Dans un pays catholique comme le Mexique, la bourde est de taille. Timothy Leary et sa suite sont cueillis, embarqués dans des camions et renvoyés manu militari aux États-Unis par avion spécialement affrété (2004: 70).33
Dans le sillage de Timothy Leary et, plus encore, après la diffusion des articles de Robert Gordon Wasson sur les champignons hallucinogènes, la municipalité de Huautla de Jiménez (Oaxaca) où vit María Sabina est confronté à l’arrivée de dizaines puis de centaines de hippies.34 Le mycologue états-unien avait eu beau cacher la véritable identité de la chamane (Heim et Wasson 1958: 69; Wasson 1974: 200), ce secret avait été rapidement dévoilé. À la recherche d’expériences mystiques et ésotériques, attirés par l’isolement géographique de la commune reflétant parfaitement la séparation du monde occidental qu’ils souhaitent (Demanget 2010: 206), les hippies, étrangers ou mexicains, ne se montrent pas toujours respectueux des croyances traditionnelles et des habitants. Par ailleurs, au-delà de la perturbation d’un village plutôt tranquille jusque-là, la présence des hippies va transformer rapidement Huautla de Jiménez et faire d’une pratique sacrée et confidentielle un business commercial avec son merchandising pas toujours de très bon goût (Demanget 2010: 199-200).
Quelques mois après la publication de son article dans Life, Robert Gordon Wasson va publiquement exprimer des remords quant à la dénaturation de Huautla de Jiménez, tout en affirmant que c’était inéluctable et, finalement, un mal pour un bien:
Les champignons sont devenus un article commercial et pendant la saison, où qu’on aille, on vous en offre. Les conseillers municipaux de Huautla parlent d’une taxe sur les champignons ou même d’en créer le monopole. Tout désormais passe par eux. Quant aux séances, chaque visiteur doit normalement s’adresser à la municipalité et celle-ci a constitué un cercle où l’on offre de révéler les anciens secrets des champignons à tout venant. […]
En mesurant les changements qui se sont produits à Huautla, on éprouve, bien entendu, une certaine nostalgie des jours anciens et le regret de ces récents développements. Mais c’est sans doute s’abandonner ici à une méprise. Ou bien le culte du champignon sacré se serait éteint sans laisser de traces devant l’apparition des avions et dès la construction de la grande route amenant le monde moderne aux portes de Huautla ; ou bien il aurait été pareillement en danger d’être découvert et exploité indignement (Heim et Wasson 1958: 78).35
Dix ans plus tard, le compagnon d’aventure de R. Gordon Wasson, le botaniste français Roger Heim, se fait plus critique:
Malheureusement, depuis que nous avons placé le petit village de Huautla de Jiménez sur la carte du monde, il y aura dix années bientôt, la presse, le tourisme, la réclame, le démarquage de nos travaux par des journalistes à la quête de sujets spectaculaires, les psychopathes, les aventuriers, les exploiteurs, les «beatniks» enfin, ont fait de ce lieu une Mecque nouvelle. Le trafic des champignons hallucinogènes, qui ont perdu leur caractère sacré, a atteint des proportions chaque année plus élevées et nos séances nocturnes tenues derrière des portes closes, dans le respect de la «chair de Dieu» et de la traduction, sont devenues d’avilissants épisodes accompagnant les séances de minuit auxquelles des visiteurs «off beat» se pressent (Heim 1967: 116-117).
Face à la présence et à l’attitude des hippies qui ne sont pas du goût des autorités, le maire de Huautla de Jiménez, avec l’aide du pouvoir central, décide en 1967 d’expulser les hippies étrangers présents dans sa commune, tandis qu’il enferme les Mexicains non sans leur avoir fait couper les cheveux préalablement (Demanget 2010: 214; García de Teresa 2010: 46-47; Rodríguez Venegas 2017: 104-105; López V. 2017: 19). Cela ne décourage pas les hippies qui continuent d’arriver et qui sont condamnés à des travaux d’intérêt général. En 1969, 84 hippies sont expulsés par l’armée, lesquels sont également la cible de la presse à scandale (Monsiváis 1977: 241).
Globalement, sous les présidences de Gustavo Díaz Ordaz (1964-1970) et de Luis Echeverría (1970-1976), particulièrement de 1968 à 1972, la répression anti-hippie fait rage: interdiction de porter des cheveux longs pour les hommes dans certains États (Monsiváis 1977: 241), accès prohibé à des lieux publics (Monsiváis 1977: 241; Esparza 2015: 183-184), suspension de l’autorisation de représentation de la comédie musicale Hair (Marroquín 1975: 50-51), censure de certains groupes de rock (Marroquín 1975: 50-51), interdiction de la revue hippie Piedra Rodante (Marroquín 1975: 50-51), brutalité policière face à des jeunes gens pacifistes,36 renforcement des peines et des amendes contre l’utilisation des drogues hallucinogènes (Demanget 2010: 219; Dawson 2015: 122), arrestations arbitraires et emprisonnement (Agustín 1993: 245-246; Agustín 2012: 78-79). C’est dans ce contexte que, durant le week-end des 11 et 12 septembre 1971, sur le modèle états-unien,37 a lieu un méga-concert de rock38 dans le village de valle de Bravo (État de Mexico), à deux heures de la capitale. À l’initiative d’Eduardo et Alfonso López Negrete, de Luis de Llano Macedo (producteur chez Telesisma Mexicano, aujourd’hui Televisa), de Justino Compeán Palacios, le vice-président d’une importante compagnie publicitaire (Marroquín 1975: 49), et avec l’autorisation de Carlos Hank González, le gouverneur de l’État de Mexico qui entendait se servir de cet événement pour ses ambitions politiques (Agustín 2012: 85), et le sponsoring de Coca-Cola (Guillén Escamilla 2004: 75-76)…,39 le festival de musique d’Avándaro accueille entre 200 000 et 300 000 personnes, surveillées par plusieurs centaines de policiers et de soldats (Zolov 1995: 337), qui sont venues écouter onze groupes de rock: Los Dug Dug’s, El Epílogo, Tequila, El Amor, Tinta Blanca, Mayita Campos et los Yaqui, El Ritual, Peace and Love, La División del Norte, Bandido et Three Souls in my Mind (Martínez Hernández 2005: 33).
Si le festival s’est plutôt bien déroulé, la presse nationale s’est largement montrée hostile au concert, n’hésitant pas à proférer des critiques acerbes et à diffuser des fake news. La plupart des articles insistent sur la «dépravation» de la jeunesse par le sexe et les drogues. Ainsi, Auxilio SOS titre «150 000 jeunes dans une orgie de sexe et de drogues»;40 Casos de Alarma dénonce «une bacchanale dantesque», «un enfer de vice et de dégénérescence»;41 pour El Heraldo de México, Avándaro fut «une orgie colossale » ayant occasionné «224 personnes intoxiquées, brûlées, écrasées, fracturées et blessées; des maisons, des voitures et des magasins pris d’assaut; la destruction d’arbres, de champs et de lignes téléphoniques»;42 pour Alarma!, le festival rima avec «[n]udité, marijuana, dégénérescence sexuelle, saleté, cheveux, sang et mort», tandis que «[l]es quelques femmes qui sont allées à Avándaro» s’y seraient comportées «comme de vulgaires femmes des rues»;43 Ovaciones se fait plus synthétique: «5 morts, 500 blessés et 1 500 intoxiqués. Drogues, sang et sexe durant le festival de rock».44 Par ailleurs, plusieurs journaux et revues accordent une large audience à un épiphénomène, symbole, selon eux, de la décadence des hippies: le fait qu’une jeune femme de 18 ans, Laura Patricia Rodríguez González Alcocer, la célèbre «encuerada [nue] de Avándaro», ait enlevée sa chemise, dévoilant ainsi sa poitrine aux autres spectateurs et aux médias avides de sensationnalisme (Woldenberg 2011; Ríos 2014: 3).45
Malgré la présence des hippies dans de nombreux endroits du pays, souvent dans le centre ou sur les côtes de l’océan Pacifique,46 et l’existence de communautés,47 le mouvement s’est peu à peu tari au Mexique comme ailleurs. Pourtant, en dépit de sa durée finalement assez éphémère et de l’attitude répressive des autorités ou des populations mainstream, le mouvement hippie semble avoir profondément marqué les sociétés contemporaines. En effet, l’essor actuel des préoccupations environnementales, du végétarisme et du véganisme, du naturisme, ainsi que l’attrait pour un tourisme chamanique relèvent vraisemblablement, en partie, de son héritage. Au Mexique, plus précisément, le mouvement hippie, qui a fini par s’amalgamer avec la jeunesse contestataire de la Onda, dont les principaux représentants sont de talentueux écrivains (Guillén Escamilla 2004: 67; Agustín 2012: 83), marque le début d’une prise de conscience du corset politique du pays. Le festival d’Avándaro fut d’ailleurs le théâtre d’au moins deux critiques publiques du régime en place. Une minute de silence fut ainsi consacrée aux personnes décédées. S’agissait-il d’un hommage à Jim Morisson, Janis Joplin et Jimmy Hendrix morts prématurément ou bien aux victimes des massacres étudiants de Tlatelolco (2 octobre 1968) et de l’halconazo (10 juin 1971) (Zolov 1995: 338)? Le second moment se produisit lorsque l’un des membres du groupe Three Souls in my Mind fit explicitement référence à la tuerie perpétrée par le groupe paramilitaire quelques semaines auparavant (Zolov 1995: 338). Une dynamique de changements se mettait en marche. Les véritables effets, en revanche, ne commenceront à être visibles qu’avec l’arrivée du nouveau siècle.
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1 Université Polytechnique Hauts-de-France Laboratoire CRISS (nicolas.balutet@uphf.fr).
2 Le terme «contre-culture» est apparu sous la plume de l’historien états-unien Theodore Roszak en 1969 avec la publication de son célèbre essai Vers une contre-culture. Réflexions sur la société technocratique et l’opposition de la jeunesse (The Making of a Counter Culture. Reflections on the Technocratic Society and Its Youthful Opposition). Se reporter à Roszak (1970) et à Couturier (2019 : 126-127). Bien que ce terme puisse paraître quelque peu négatif, il est néanmoins bien choisi dans la mesure où il s’agit de mettre en avant des pratiques et des valeurs qui, radicalement, remettent en cause les normes de la culture dominante et tentent de la transformer.
3 Le LSD, de l’allemand Lyserge Säure Diethylamid, est un dérivé de l’acide lysergique, un alcaloïde de l’ergot de seigle, c’est-à-dire un champignon parasite des graminées. Synthétisé en 1938 par Albert Hoffman alors qu’il travaille pour le laboratoire Sandoz, les propriétés psychotropes ne sont découvertes qu’un lustre plus tard, en 1943, après que le chimiste suisse a procédé à de nouvelles expérimentations approfondies, notamment sur lui-même. Le monde scientifique anglo-saxon s’empare dès lors de l’hallucinogène mais ce sont deux psychologues de l’Université d’Harvard, Timothy Leary et son assistant Richard Alpert, qui vont le populariser (Saint-Jean Paulin 1997: 128; Chastagner 2011: 97; Robert 2011: 90-91).
4 «Se atribuyen maravillosas propiedades a esta raíz, si es que puede darse alguna fe de lo que comúnmente se dice a este respecto. Causa en aquellos que lo ingieren la capacidad de prever y predecir hechos.» Francisco Hernández, Historia Natural de Nueva España (Evans Schultes, Hofmannet Rälsch 2000: 146).
5 «Hay otra yerba como tunas de tierra, se llama “peyotl”; es blanca, hácese hacia la parte del Norte; los que la comen o beben ven visiones espantosas o irrisibles; dura esta borrachera dos o tres días y después se quita; es común manjar de los chichimecas, pues los mantiene y les da ánimo para pelear y no tener miedo, ni sed, ni hambre, y dicen que los guarda de todo peligro.» Bernardino de Sahagún, Historia general de las cosas de Nueva España (Livre XI, Chapitre VII) (Urbina 1903: 32).
6 «Cuéntase con verdad del peyote, del poyomate y del holoquisque que, si se toman por la boca, sacan tan deveras de juicio al miserable que las toma que, entre otras terribles y espantosas phantasmas, se les representa el demonio, y aun les da noticia según dizen de cosas por venir, y debe ser todo trazas y embustes de Sathanás, cuya propiedad es engañar con permissión divina al miserable que en semejantes ocasiones le busca. » Cárdenas (1988: 33-34).
7 «La raíz que más veneran es una llamada peyotl, la cual muelen y beben en todas sus enfermedades; y no fuera esto tan malo si no abusaran de sus virtudes: porque para tener conocimiento ele los futuros y saber cómo saldrán de las batallas, la beben deshecha en agua, y como es tan fuerte, les da una embriaguez con resabios de locura; y todas las imaginaciones fantásticas que les sobrevienen con la horrenda bebida, cogen por presagios de sus designios, imaginando que la raíz les ha revelado sus futuros sucesos. » José Arlegui, « Crónica de la provincia de Zacatecas » (Partie II, Chapitre VI: 154-155) (Urbina1903: 26). Se reporter également à Stewart (2001: 46).
8 Pour les différents noms du peyotl selon les peuples, se reporter à Diguet (1907: 22-23).
9 Sur les manifestations de «l’ivresse péyotlique», lire Rouhier (1989: 265-339).
10 Sur la religion du peyotisme aux États-Unis, se reporter à Lanternari (1983: 73-121).
11 Pour d’autres récits du XVIe au XVIIIe siècle (Gaspar de Covarrubias, Fernando de Alvarado Tezozomoc, Diego de Nájera Yanguas, etc.), se reporter à Heim et Wasson (1958).
12 «Otros[hongos] cuando son comidos no causan la muerte pero causan una locura a veces durable, cuyo síntoma es una especie de hilaridad irresistible. Se les llama comúnmente teyhuinti. Son de color leonado, amargos al gusto y poseen una cierta frescura que no es desagradable. Otros más, sin provocar risa, hacen pasar ante los ojos visiones de todas clases como combates o imágenes de demonios. Otros más, siendo temibles y espantables, eran los más buscados por los mismos nobles para sus fiestas y banquetes, alcanzaban un precio extremadamente elevado y se les recogía con mucho cuidado: esta especie es de color oscuro y de cierta acritud». Francisco Hernández, Historia Planetarium Novae Hispaniae (Livre IX, Chapitre XCV) (Benítez 1973: 208).
13 «Tenían otra manera de embriaguez que los hacía más crueles: eran con unos hongos o setas pequeñas, que en esta tierra los hay como en Castilla; mas los de esta tierra son de tal calidad, que comidos crudos y por ser amargos, beben tras ellos y comen con ellos un poco de miel de abejas; y de allí a poco rato veían mil visiones y en especial culebras; y como salían fuera de todo sentido, parecíales que las piernas y el cuerpo tenían llenos de gusanos que los comían vivos, y así medio rabiando se salían fuera de casa deseando que alguno los matase; y con esta bestial embriaguez y trabajo que sentían, acontecía alguna vez ahorcarse y también eran contra los otros más crueles. A estos hongos llámanles en su lengua teunanactlh, que quiere decir carne de Dios o del Demonio que ellos adoraban y de la dicha manera con aquel amargo manjar su cruel dios los comulgaba.» Toribio de Benavente «Motolinía», Historia de los indios de la Nueva España (Benítez 1973: 208).
14 André Thévet, Histoyre du Mechique (Chapitre IV) (Heim et Wasson 1958: 17).
15 «La primera cosa que se comía en el convite eran unos honguillos negros que ellos llaman nanácatl, que emborrachan y hacen ver visiones, y aun provocan a lujuria; esto comían antes de amanecer y también bebían cacao, antes de amanecer; aquellos honguillos comían con miel, y cuando ya se comenzaban a calentar con ellos, comenzaban a bailar, y algunos cantaban y algunos lloraban porque ya estaban borrachos con los honguillos. Y algunos no querían cantar, sino sentábanse en sus aposentos y estábanse allí, como pensativos, y algunos veían en visión que se morían, y lloraban. Otros veían en visión que los comía alguna bestia fiera. Otros veían en visión que cautivaban en la guerra. Otros veían en visión que habían de ser ricos. Otros veían en visión que habían de tener muchos esclavos. Otros veían en visión que habían de adulterar y les habían de hacer tortilla la cabeza, por este caso. Otros que habían de matar a alguno, y por el caso habían de ser muertos. Otros veían en visión que se ahogaban en agua. Otros veían en visión que vivirían y morirían en paz. Otros que caerían de lo alto y morirían de la caída. Todos estos acontecimientos desastrosos veían en visión. Otros veían que se sumían en el agua, en algún remolino. Después que había pasado la borrachera de los honguillos, hablaban los unos con los otros acerca de las visiones que habían visto. » (Sahagún 2000: Livre IX, Chapitre VIII, 56).
16 «Y lo mismo hacían de los que llaman nanacatl; que son los hongos malos que emborrachan también como el vino: y se juntaban en un llano después de haber comido, donde bailaban y cantaban de noche, y de día a su placer; y esto el primer día, y luego el día siguiente lloraban todos mucho y decían: que se limpiaban y lavaban los ojos y caras con sus lágrimas.» Bernardino de Sahagún, Histoire générale des choses de la Nouvelle Espagne (Livre X, Chapitre XXIX) (Benítez 1973: 207).
17 «Hay unos honguillos en esta tierra que se llaman teonanácatl que se crían debajo del heno en los campos y páramos; son redondos y tienen el pie altillo y delgado y redondo. Comidos son de mal sabor, dañan la garganta y emborrachan. Son medicinales contra las calenturas y la gota; hanse de comer dos tres, no más y los que los comen ven visiones y sienten bascas en el corazón; a los que los comen muchos de ellos provocan a lujuria, y aunque sean pocos. » (Sahagún 1977: Livre XI, Chapitre VII, 666).
18 «Acabado el sacrificio, y quedando las gradas del templo y patio bañadas de sangre humana, de allí iban todos a comer hongos crudos, con la cual comida salían todos de juicio y quedaban peores que si hubieran bebido mucho vino; tan embriagados y fuera de sentido que muchos dellos se mataban con propia mano, y con la fuerza de aquellos hongos, veían visiones y tenían revelaciones de lo porvenir, hablándoles el demonio en aquella embriaguez.» Diego Durán, Historia de las Indias de Nueva España (Heim et Wasson 1958: 38).
19 «y el caso fue que a él había venido un indio natural del pueblo de Tenango, gran maestro de supersticiones, y se llamaba Juan Chichiton, que quiere decir perrillo, el cual había traído los hongos colorados que se cogen en el monte, y con ellos había hecho una gran idolatría, y antes de decirla, quiero explicar la calidad de los dichos hongos, que se llaman en la lengua mejicana Quautlan nanacatl. Y habiendo consultado al licenciado don Pedro Ponce de León, […] me dijo que estos hongos eran pequeños y colorados, y que para cogerlos iban al monte los sacerdotes y viejos diputados para estos embustes, y estaban casi toda la noche en oración y deprecaciones supersticiosas, y al amanecer, cuando comenzaba cierto vientecillo que ellos conocen, entonces los cogían, atribuyéndoles deidad, y teniendo el mismo efecto que el ololiuhqui o el peyote, porque comidos o bebidos los embriaga y priva de sentido, y les hacen creer mil disparates. Este, pues, Juan Chichiton […] les dio a todos los circunstantes que se habían juntado a la fiesta a comer de los hongos como a modo de comunión, y a beber del pulque, […]; que los hongos por su parte, y el pulque por la suya, los sacó de juicio que fue lástima.» Jacinto de la Serna, Manual de Ministros de lndios para el conocimiento de sus idolatrías y extirpación de ellas (Chapitre IV) (Heim et Wasson 1958: 40-41).
20 Sur María Sabina, lire Solier (1965) et Grinberg-Zylberbaum (1994).
21 «Hay un mundo más allá del nuestro, un mundo invisible, lejano pero también cercano. Allí vive Dios, viven los muertos, los espíritus y los santos; es un mundo donde todo ha sucedido y todo se sabe. Ese mundo habla, tiene un lenguaje propio. Yo repito lo que me dice. Los hongos sagrados me llevan y me traen al mundo donde todo se sabe. Son ellos, los hongos sagrados, los que hablan en una forma que yo puedo entender. Yo les pregunto y ellos me responden. Cuando regreso del viaje, digo lo que ellos me han dicho, me han mostrado.» (Evans Schultes, Hofmannet Rälsch 2000: 156).
22 On la trouve surtout dans les États de Oaxaca, Morelos, Mexico, Guerrero, Puebla, Hidalgo et Tlaxcala (Agustín 2012: 54).
23 Elle serait représentée sur des peintures murales de Teotihuacan et de Tepantitla en lien avec le culte de la déesse Xochiquetzal (Furst 1974b: 68; Evans Schultes 1995: 9-18; Agustín 2012: 55).
24 «[e]l ololiuhqui es un género de semilla como lentejas que la produce un género de yedra desta tierra, y bebida esta semilla priva del juicio, porque es muy vehemente; y por este medio comunican al demonio, porque les suele hablar cuando están privados de juicio con la dicha bebida y engañarlos con diferentes apariencias y ellos lo atribuyen a la deidad que dicen está en la dicha semilla, llamada ololiuhqui o cuexpalli que es una misma cosa.» (Ruiz de Alarcón 1959: Tome 1, 28).
25 Ce faisant, les hippies commencent à sensibiliser la population aux problématiques environnementales.
26 Leur quête de spiritualité prend également d’autres directions comme un retour au christianisme primitif ou un attrait pour le bouddhisme. Malgré leur diversité, toutes ces croyances ont un point commun: la recherche de communion, un retour à la bonté, à la charité, à la simplicité, à la pauvreté, loin de l’individualisme, du matérialisme et de la violence de la société contemporaine (Niel et Young 1977: 570-572; Saint-Jean Paulin 1997: 91-92; Monneyron et Xiberras 2008: 24-25; Chastagner 2011: 107-108).
27 C’est le cas aussi aux États-Unis où les hippies sont majoritairement des jeunes Blancs issus de milieux sociaux favorisés (Creagh 1983: 157-158).
28 Il suffit de regarder les réactions suite au festival de musique d’Avándaro dont nous allons reparler. Certains médias et intellectuels, souvent marqués à gauche, ont fermement condamné le festival moins pour l’usage des drogues et la nudité de certains participants que pour la musique rock et la présence de drapeaux américains et britanniques, autant de preuves, pour eux, que le mouvement hippie est un signe de l’impérialisme anglo-saxon (Guillén Escamilla 2004: 83-87). Ainsi, l’écrivain et essayiste Carlos Monsiváis n’hésita pas à considérer Avándaro comme «un fait colonial» («un hecho colonial»), la reproduction d’«une expérience étrangère » («una experiencia ajena»), une «émulation servile » («emulación servil»), «un énorme processus d’acculturation » («un enorme proceso de aculturación») (Monsiváis 1977: 252).
29 Enrique Marroquín (1975) parle d’ailleurs à propos des hippies mexicains de xipitecas pour montrer, à travers la nahuatlisation du mot, que des spécificités du mouvement existent dans le pays.
30 Ce n’est pas vraiment le cas aux États-Unis. Bien que l’action des hippies soit intrinsèquement politique dans la mesure où elle entend remettre en question les fondements de la société capitaliste, militariste, bourgeoise, consumériste, peu s’engagent dans une lutte politique effective. Selon le photographe Bernard Plossu, dans un texte de jeunesse, un hippie, «c’est quelqu’un qui n’est ni à gauche ni à droite, qui n’a pas d’engagement politique car, pour lui, la droite et la gauche, c’est la même chose, c’est deux formes de police. Le hippie recherche la liberté totale, sans idées politiques» (1970: 73). Il y a quelques exceptions comme les yippies ou membres du Youth International Party, sorte de libertaires révolutionnaires, dont le chef de file est Jerry Rubin (1973).
31 Suzanne Labin souligne avec raison que l’homosexualité masculine est peu pratiquée chez les hippies mais serait «admise par tous comme un des droits intangibles de la liberté sexuelle» (1970: 216). Il convient de noter également que les célèbres rapports du biologiste Alfred Charles Kinsey, Sexual Behavior of the Human Male (1948) et Sexual Behavior of the Human Female (1953), avaient déjà montré quelques années auparavant que le comportement sexuel des hommes et des femmes n’était pas aussi normé qu’il le semblait en apparence (Chastagner 2011: 34).
32 Au-delà de la sexualité, on assiste à une certaine porosité entre les genres. À l’instar des femmes, les hommes commencent à utiliser des bijoux aux poignets et au cou (colliers, pendentifs, bracelets) et à porter les cheveux longs, lesquels évoquent également les cultures indiennes. Suzanne Labin, dans son ouvrage très critique envers le mouvement contre-culturel, qualifie les hippies d’individus «épicènes», c’est-à-dire que rien ne différencierait les hommes des femmes: «mêmes cheveux longs, mêmes pantalons, même genre de bijoux et tatouages psychédéliques. Ils ou elles se livrent aux mêmes activités […]. Les hommes ne montrent aucune agressivité masculine, ils ne sont pas compétitifs entre eux dans la séduction des femmes; ils ne recherchent pas la suprématie de l’esprit, ni l’initiative des liaisons, ni l’activité dirigeante dans les rapports sexuels». Retour à la nature… dans les propos de l’essayiste française qui enferme les hommes dans certaines caractéristiques intrinsèques, ce qui lui fait regretter «la perte de virilité des mâles» et leur «amolissement» (Labin 1970: 218).
33 Lire également Leary (1984: 214), Granjon (1985: 252) et Saint-Jean Paulin (1997: 137).
34 Sur Huautla de Jiménez, consulter les travaux de Magali Demanget (2003; 2007, 2010).
35 Dans ses Mémoires acides, Timothy Leary (1984: 117) se montre très critique envers l’attitude de R. Gordon Wasson.
36 On peut penser, par exemple, à l’épisode du «Parque Hundido» de Mexico en 1967. Environ 200 hippies se sont réunis dans ce ce parc pour refaire le monde quand la police arrive en nombre et demande aux personnes de se disperser. Les hippies décident préalablement d’enlever leurs déchets et s’en vont défiler sur l’avenue Insurgentes en chantant et en donnant des fleurs aux automobilistes. Une fois devant le moment de l’Indépendance, ils sont attaqués par les forces de l’ordre (Marroquín 1975: 38-39; Agustín 2012: 78-79).
37 Monterey en juin 1967, Woodstock en août 1969 et Altamont en décembre de la même année sont les trois grands festivals musicaux des hippies états-uniens. Si le premier accueillit près de 200 000 personnes, Woodstock, avec ses 32 artistes et plus de 400 000 personnes, «demeure le concert de rock par excellence, la référence à laquelle tous les autres rassemblements musicaux se jaugent et se comparent» (Robert 2011: 132, 135-136).
38 Le rock est une des composantes essentielles du mouvement hippie. Il s’agit non seulement d’une musique sensuelle et rebelle par ses messages contre l’establishment mais, à l’instar de l’effet de certaines drogues, elle peut provoquer une sorte de transe en raison de son rythme et des fréquences des instruments comme la batterie ou la basse (Saint-Jean Paulin 1997: 168-169, 177; Guillén Escamilla 2004: 45; Robert 2011: 106).
39 Comme le souligne fort justement Christiane Saint-Jean Paulin, le rock témoigne parfaitement des «contradictions de la contre-culture». En effet, suivant la pensée du philosophe Herbert Marcuse et ses critiques contre les excès et le conditionnement des individus par la société de consommation, « [i]l dénonce le conformisme, le matérialisme et certaines valeurs traditionnelles, mais il est lui-même le produit d’une culture de masse, fabriquée par un show business dont le but est avant tout commercial» (1997: 21-24, 179).
40 «150,000 jóvenes en una orgía de sexo y drogas» (Villareal 2014: 98).
41 «una bacanal dantesca», «un infierno de vicio y degeneración» (Villareal 2014: 98).
42 «una colosal orgía», «224 casos de intoxicados, quemados, atropellados, fracturados y heridos; casas, autos y tiendas asaltadas; la destrucción de árboles, sembradíos y líneas telefónicas » (Agustín 2012: 88).
43 «Encueramiento, mariguaniza, degenere sexual, mugre, pelo, sangre y muerte», «Las pocas damas que fueron a Avándaro se comportaron como vulgares mujeres de la calle» (Martínez Hernández 2005: 34-35).
44 «5 muertos, 500 lesionados y 1,500 intoxicados. Drogas, sangre y sexo en el festival de rock» (Martínez Hernández 2005: 34-35).
45 D’autres réactions de la presse mexicaine sont consultables dans Zolov (1995: 368). Le puritanisme de la société mexicaine est aussi très frappant lorsqu’un des membres du groupe Peace and Love s’exclame «¡Chingue a su madre el que no cante!» («Que celui qui ne chante pas nique sa mère!»). Si l’expression n’est pas du meilleur goût, elle provoqua la suspension de la retransmission du festival sur Radio Juventud (Zolov 1995: 335; Guillén Escamilla 2004: 78).
46 Huautla de Jiménez, San José del Pacífico (Oaxaca); San Cristóbal de Las Casas (Chiapas); Real del Catorce (San Luis Potosí); San Miguel Allende (Guanajuato); Cabo San Lucas (Basse-Californie du Sud); Vallarta, Yelapa, Barra de Navidad, Ajijic (Jalisco); Manzanillo (Colima); Acapulco (Guerrero); Puerto Escondido, Puerto Ángel, Zipolite (Oaxaca); México (Agustín 1993: 243-245; 2012: 73; Rodríguez Venegas 2017: 102).
47 Dans leur entreprise de constituer une nouvelle société, certains hippies expérimentent des modèles de communautés (religieuses, agraires ou rurales et urbaines). L’idée est d’instaurer de nouveaux rapports entre les individus reposant sur le partage et la coopération, l’amour et l’amitié, la créativité et le jeu, etc. (Granjon 1985: 463; Saint-Jean Paulin 1997: 83, 89-94; Chastagner 2011: 107; Monneyron 2011: 215-216). Des communautés ont aussi existé au Mexique dans les endroits suivants: Puente de Fierro (Oaxaca), Ocotlán (Jalisco), El Vergel (Oaxaca), à Uruapán (Michoacán), à Amatlán de Quetzalcóatl (Morelos), etc. (Monsiváis 1977: 242; García de Teresa 2010: 41; Agustín 2012: 81; Esparza 2015: 182).
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